" Le retour du Petit Prince " TA...TA...TA...TAM... N°225

Le retour du Petit Prince

            Alors que je m’étais égaré dans le désert,  j’entendis dans mon dos une petite voix douce, fluette qui m’appelait, et me rappelait quelqu’un, un revenant de mon enfance… Je me retournai et, pas de doute, c’était bien lui, le Petit Prince en personne, avec sa chevelure dorée coiffée en pétard… Interloqué, je lui demandai :

-        qu’est-ce que tu fais-là ?… Par quel céleste toboggan es-tu descendu de ton astéroïde ?…

Je le vis se cabrer et s’inquiéter :

-        Mais tu n’es pas Antoine, toi ! … T’es qui ?

-        Je m’appelle Charlie…  

-        Allez, Charlie, dessine-moi un mouton…

 Tout-à-coup effrayé, je m’entendis lui répondre :

- Dessiner ?… Mais tais-toi, malheureux ! C’est bien la dernière chose à faire sur la terre en ce              moment… Dessiner ?… Innocent !… Toujours la tête dans tes nuages… On voit bien que tu ne lis pas les journaux… Le désert n’est plus ce que tu as connu : les dunes ont des oreilles…

Mais c’est qu’ il insiste, le bougre :

-        Dessine-moi un mouton !…

Je lui explique en gros :

-        Petit Prince,  le désert de l’amour s’étend à la planète entière ;  l’E.I., Boko Haram, Al Qaïda au Maghreb, en Irak et au Yémen, tous ces terroristes, ces venimeux serpents à sornettes, rien ne les arrête, aucune atrocité…

Je l’entends, déconfit, déplorer :

-        Ah ! la ! la !… 

-        Que dis-tu là ?… Ne blasphème pas !… Il pourrait t’en cuire… Je pense à cet aviateur jordanien…

-         Mais que se passe-t-il chez vous ? s’angoisse-t-il…

Moi, dépité :

-        C’est fini de rêver, Petit Prince : Ton renard, ta rose, la philosophie, la poésie, tout ça, sur Terre, c’est dépassé. Nous sommes devenus fous… Regagne B612 et n’en bouge plus… Bien des grains de sable du désert devront couler dans le Sablier avant que ne reviennent ici l’amour et l’Amitié…

Alors qu’il agitait son mouchoir en signe d’adieu, je vis une larme perler sur sa joue… Le Petit Prince avait eu tort de croire en nous…

                                                                                 Hagnéré Jean-François ( 06/02/2015 )