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Notes discordantes sur l'époque
7 décembre 2017

"Avec le temps, va, tout s'en va..." TA...TA...TA...TAM...N°393

 Avec le temps, va, tout s’en va….

            Jean d’Ormesson, Jean d’O pour les intimes,  le Courtisan, l’Immortel de l’Académie française, venait à peine de rendre le l’âme le 5 décembre, entraînant un délire médiatique, qu’au cours de la nuit du lendemain, Johnny Hallyday, notre Jojo national lui cassait la baraque, sa disparition éclipsant même la venue de Saint-Nicolas… Toujours aussi iconoclaste, l’Idole des jeunes… Un seul être vous manque et tout est dépeupléNoir, c’est noir, il n’y a plus d’espoir… Place aux micros-trottoirs, car on a tous eu, un jour ou l’autre, chez nous,  un de ses disques qui traînait :  On a tous en nous quelque chose de…Johnny, ce rêve de vivre avec ses mots à lui… Ah ! Qui chantera la solitude du fan abandonné par son «  idole des jeunes » -aujourd’hui vieillards -, celle de tous les garçons et les filles… des fameuses Sixties ? Á  entendre les médias lors des 24 heures qui ont suivi l’annonce de la disparition du chanteur fétiche, de l’Elvis français, notre pays a connu une secousse tellurique, classée 9  sur l’échelle de Richter… Les disparitions d’Edith Piaf, de Trenet,  de Brassens ou encore de Barbara? De la gnognotte, à côté…

            Bon, Jojo, on a beau rigoler nerveusement pour se détendre un peu, il a, en son temps, celui des yéyés et des copains, secoué, sérieusement aidé de quelques potes, le cocotier des fameuses Sixties dans une France endormie par le verbe gaullien. Il vient de nulle part, abandonné par ses parents aux membres d’une famille d’artistes qui court le cachet. Parmi eux, il va faire ses classes. Jean-Philippe Smet va devenir Johnny Hallyday après un passage dans L’Ecole des vedettes, une émission présentée par Denise Glaser. Il  a pour marraine, Line Renaud – Ma cabane au canada, Combien pour ce chien dans la vitrine…-. Jojo balance, tout en déhanchements, accroché à sa guitare,: « Laisse les filles »… A la même époque il chantera « Itsi Bitsi Petit bikini », chef d’œuvre surréaliste que j’achèterai un jour dans un monoprix de Berck-sur-mer.

            A l’époque, j’écoute Dalida-Bambino, Mick Michel-Un gamin d’Paris, Bécaud-Les marchés de Provence, Dario Moreno-Si tu vas à Rio et Bourvil- La tacquetacquetique du gendarme, sur mon tourne-disques, bref, que du lourd… Mais j’ai la chance d’avoir deux voisins qui vont m’ouvrir une voie  royale : Daniel, marin pêcheur, me prête Aznavour–Je m’voyais déjà, Brassens-Le cocu, Edith Piaf – La foule  et un ovni quatre titres américains dont Jailhouse rock et Hound dog, interprétés par un dénommé Elvis Presley… Un autre voisin, Roland, dépanneur de Juke-boxes, me revend à bas pris des œuvres qui ont fait leur temps ; de son côté,  mon ami d’adolescence, Lucien, toujours en avance de plusieurs longueurs sur son temps, sort de dessous son lit, une pochette rouge indiquant des chansons pour adultes,  libérant ainsi, pour ma plus grande joie,  Le gorille de Brassens… L’extase ! Johnny, c’est bien, mais à côté d’Elvis, ça me semble un peu mou du genou… Si par la suite Elvis sombrera dans la guimauve, Johnny continuera à ramener Quoi ? [ sa ] gueule… Mais ma vraie idole restera Brassens… Johnny, j’économiserai l’argent destiné aux ducasses du Nord afin de me payer ses premiers enregistrements : Douce violence ou Il faut saisir sa chance… Aznavour et son gendre, le pianiste de jazz Garvarentz, vont lui écrire des « tubes » et feront de Sylvie Vartan, La plus belle pour aller danser… Toutefois, ces premières œuvres seront échangées contre un seul 45 T d’un copain de classe: Life’s too short  de The Lafayettes – Ah ! ce cliquetis de la baguette sur le bord de la caisse d’une batterie…

            Un vent nouveau souffle sur le pays des fameuses Trente glorieuses, pas si rieuse que ça pour tout le monde d’ailleurs. Chez les marins pêcheurs, les revenus sont fluctuants, tributaires des sautes de vent… Heureusement la musique… C’est le temps des « copains », des « yéyés » -fameux cri de guerre : Johnny, Sylvie, Françoise, Cloclo, Dutronc, Eddie et les Chaussettes noires, Dick et ses Chats sauvages, Antoine, etc. il pousse des groupes de rock partout… Jean-Marie Périer met en scène pour ses photos d’anthologie tout ce petit monde… Ça chante la vie, l’amour, ça se rebelle, ça danse le rock, le twist - yé-yé-yé-yé, le Madison, le jerk… Dès cinq heures de l’après-midi, au retour de l’école, on « ouvre le poste » pour écouter, sur Europe 1, Salut les Copains, émission de Daniel Filipacchi qui, d’entrée, propose le Chouchou de la semaine, la rengaine à la mode… Les « idoles des jeunes », Johnny en tête passent dans le studio  saluer « les Copains ». Philipacchi crée une revue éponyme que les jeunes s’arrachent et dans laquelle les « idoles des jeunes » sont mis en photo et en scène avec talent par Jean-Marie Périer, fils d’ Henri Salvador adopté par François Périer, l’acteur.  A la télé, Albert Rainer, du célèbre trio d’harmonicistes, propose une fois par mois à la télé, en « noir et blanc »,  l’immanquable Âge tendre et tête de bois – Titre d’émission tirée d’un succès de Gilbert Bécaud -. A Paris, les aspirants vedettes ont droit au Tremplin du Golf Drouot, lieu dont le nom reste mythique. C’est sur cette scène que les « idoles » font leurs débuts… Ça ferraille partout sur les guitares, ça joue et chante comme des casseroles, mais ça vit… Les pattes d’éph’ pour les gars, la minijupe pour les filles… Après 1945, c’est une deuxième Libération, celle des jeunes… Mais l’indétrônable idole, au fil des années, c’est Johnny, qui endosse, caméléon, tous les costards : Du militaire au hippie, sans sourciller – Pour lui, d‘ailleurs, Jésus-crist est un hippie… Youpi !… Jojo,  c’est un chanteur, mais aussi bientôt un acteur… D’ailleurs le cinéma, en particulier Godard, finira par s’intéresser à lui… Une autre vie va commencer-er-er…C’est un instinctif, Johnny, toujours à flairer le bon coup… Mais attention la pop anglaise débarque... Jojo s’adapte à tous les courants… une éponge…       

La jeunesse va repousser les murs du gaullisme, un soir, Place de la Nation, une soirée «  à tout casser », comme Johnny… Cela ira crescendo jusqu’au mois de Mai 68… La France fait sa mue… La jeunesse aussi… Place aux nouvelles générations que la loi Weil va bientôt libérer un peu plus sexuellement… Merci Simone !  En attendant, les jours du Général au pouvoir, dont on ne peut nier le mérite, sont comptés… Papa, t’es plus dans l’coup, Papa !… La résistance du Général a ses limites…

            Et Johnny dans tout ça ? Il bénéficiera toujours en France du même capital de sympathie, trimballant ses toujours fans et leur descendance dans une transhumance ;  de ville en ville, [il fait] un long, long chemin, allant d’une salle de spectacle à un grand stade, sans jamais décrocher, se ressourçant de temps à autre aux États-Unis qui le firent tant rêver… Au fil du temps, des paroliers et musiciens de toutes les générations ont écrit pour lui, des plus anciens : Aznavour ( Retiens la nuit), Labro (Poème sur la 7ème,, , car Johnny a chanté sur… une symphonie Beethoven, des paroles écologiques…), Thibault ( Cheveux longs, idées courtes, réponse à Antoine), aux plus jeunes :  Goldmann  (Laura et L’envie), Obispo, Zazie ( Allumer le feu )… Johnny a repris magnifiquement  L’hymne à l’Amour de Piaf, cet amour – celui d’un père et d’une mère - qui, au départ lui avait fait défaut… Johnny, dans tous les domaines, est généreux…

            On peut penser de l’homme ce qu’on veut, mais combien, parmi nous, ont eu une vie aussi pleine, combien parmi nous se sont tournés vers lui pour la remplir ? En pleurant sur Johnny, nous pleurons aussi sur notre jeunesse qui - avec le temps, va, tout s’en va - a foutu le camp…. Alors de temps en temps, sous la douche, on se rafraîchissait la mémoire et on se chauffait la voix  et on poussait , encore une fois, le cri de la jeunesse, le cri de la jeunesse qui veut saisir sa chan-an-ce ! A ta façon, déjà, avec tes cris Johnny, tu étais un lanceur d’alerte, un empêcheur de dormir en rond, Da-dou-ron-ron ! Comme le chantait Higelin : Tu « alertais les bébés » des pièges qui les attendent…  Tes chansons ? Avant tout un message d’amour…                        

 

                                                                                                     Hagnéré Jean-françois ( 06/12/2017)

                                                                              Extrait de « Kaléidoscope » ou « Une egothérapie »

 

            

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